02/12/2024

Rivière, sans retour


Moi, Pierre Rivière, ayant égorgé ma mère, ma sœur et mon frère... de René Allio (1976).

"Je ne veux pas du jugement des hommes, je ne cherche qu'à propager des connaissances, je me contente de relater; même avec vous, Eminents Messieurs de l'Académie, je me suis contenté de relater."
Franz Kafka, Rapport pour une académie.

Eloge de la parole.

Rappelons les faits: le 3 juin 1835, au lieu-dit La Faucterie, Pierre Rivière, jeune paysan normand âgé de vingt ans, tue à coups de serpe sa mère enceinte de six mois, ainsi que sa sœur Victoire et son petit frère Jules qui vivaient avec elle. Son triple meurtre accompli, il s’enfuit et erre plusieurs semaines dans la campagne avant d’être arrêté. En prison, il rédige un mémoire, véritable autobiographie dans laquelle il expose les raisons de son geste: délivrer le père des "peines et afflictions" que lui faisait subir la mère depuis le premier jour de leur mariage, mariage arrangé dans le seul but, pour le père, d’échapper à la conscription, et rapidement transformé, par la mère, en "western" conjugal, celle-ci refusant de quitter sa maison, défendant avidement ses biens et ruinant chaque jour davantage un mari de plus en plus résigné. Le fait divers ne fit pas à l’époque autant de bruit, et pour cause, que la machine infernale de Fieschi, destinée à tuer le roi, mais il fut l’objet d’un débat passionné entre magistrats et psychiatres, les premiers voyant en Rivière un criminel monstrueux, parfaitement responsable de son acte — le mémoire en était la preuve — là où les seconds ne voyaient, à l’instar des villageois, qu’un pauvre fou aux comportements bizarres depuis l’enfance. Pierre Rivière est finalement condamné à mort, mais sa peine est commuée en réclusion perpétuelle après que les plus grands psychiatres de Paris, Esquirol en tête, l’eurent solennellement déclaré atteint d’aliénation mentale. Le 20 octobre 1840, celui qui se décrivait comme "déjà mort" se pend dans sa cellule.

En 1971, Michel Foucault découvre le cas par hasard et, subjugué par la beauté du texte, décide de le publier sous la forme d’un dossier. Y sont regroupés, outre le mémoire, des pièces judiciaires (dont l’interrogatoire de Rivière et les témoignages des villageois), des rapports médicaux, des articles de presse et, encadrant l’ensemble, des notes écrites par Foucault et ses collaborateurs. Le livre connaît un succès phénoménal. Pour Foucault, "publier ce livre, c’était (...) une manière de dire à messieurs les psy... en général (psychiatres, psychanalystes, psychologues) de leur dire: voilà, vous avez 150 ans d’existence, et voilà un cas contemporain de votre naissance. Qu’est-ce que vous avez à en dire? Serez-vous mieux armés pour en parler que vos collègues du XIXe siècle?" (1) De réponse, il n’y en eut pas, plus d’ailleurs par l’effet de sidération que produisit le livre que par une quelconque incapacité à discourir sur le cas. Il faut dire que par sa structure babélienne, plaçant le texte de Pierre Rivière au centre d’un dispositif qui semble l’éloigner à mesure qu’on s’en approche, le livre finit par susciter le même pouvoir de fascination que celui exercé directement par le mémoire. De plus, la tactique employée, visant à jauger le discours des autres — en l’occurrence celui des psychiatres et des psychanalystes au début des années 70 — à partir d’un texte qu’on a soi-même décidé de ne pas interpréter (pour éviter justement tout effet de réduction), ne pouvait que rencontrer le silence. Dès lors, rien d’étonnant à ce que cela soit sur le seul terrain de l’art que l’on répondit au désir de Michel Foucault de parler à nouveau de Pierre Rivière. C’est le défi relevé par René Allio lorsqu’il se lance en 1975 dans l’adaptation cinématographique du dossier. Ce qui frappe dans Moi, Pierre Rivière, pour qui connaît le livre, c’est la manière dont Allio arrive à se dégager du dossier tout en y restant scrupuleusement fidèle. C’est sur cette contradiction apparente que repose toute la dynamique du film: dépasser l’aspect stratégique, et forcément aride, du dispositif sans en trahir l’idée (l’inaccessibilité du texte de Rivière aux discours interprétatifs). Par quels moyens? Bien sûr, le principe de la représentation annule pour une bonne part le côté abstrait du dossier, avec toutes ces pièces assemblées comme dans un puzzle. Mais les autres représentations du cas n’ont pas la force que dégage le film d’Allio. Une force qui doit d’abord au choix du réalisateur de faire "jouer" son film par des paysans vivant à l’endroit même où, un siècle et demi plus tôt, s’était déroulé le drame. La non-interprétation du meurtre/texte se trouve ici redoublée par la non-interprétation (au sens professionnel) d’acteurs ressuscitant, plus qu’ils ne la joueraient, une pièce de leur passé. Pour René Allio, il s’agissait de faire entendre, à travers son film, la parole populaire (et ses accents patoisants), de redonner, à l’occasion de cette représentation d’une tragédie leur appartenant, la parole aux paysans. Ce choix, on le sait, est né de l’expérience des Camisards où le cinéaste avait fait tenir le rôle des paysans cévenols par des acteurs parisiens, ce qu’il avait regretté par la suite. Car pour Allio, "Paris est le lieu où s’institutionnalise la confiscation de la parole populaire. C’est là qu’on invente le personnage du cinéma dominant, celui qui fait l’histoire et qui est toujours un héros." (2) A cet égard, Pierre Rivière peut être vu, aussi, comme un moyen de rendre la parole au personnage de fait divers, personnage souvent issu du peuple et dont l’histoire se trouve, à travers le discours médiatique qui s’en fait l’écho, toujours réduite à des stéréotypes. Retrouver ainsi, en s’appuyant sur le même fonds culturel, en inscrivant l'œuvre sur le registre du quotidien et de la proximité, l’authenticité du fait divers.

Labourer, moissonner, rassembler le foin, traire la vache, baratter le beurre, faire le cidre... tout cela donne à Moi, Pierre Rivière un petit côté Farrebique que viennent magnifier la beauté des images (les effets de lumière, l’harmonie des couleurs à dominantes gris, bleu et marron) et l’extraordinaire travail sur le son. Reste que la force du film ne se limite pas à son aspect ethnologique, comme elle ne se limite pas non plus à cette opposition un peu trop didactique — champ/contrechamp — entre, d’un côté, les paysans-acteurs, filmés frontalement (en plans fixes ou en travellings) au milieu d’un décor (inspiré des tableaux de Millet) dans lequel ils semblent se fondre, et, de l’autre, les notables, joués par des comédiens professionnels, tout de noir vêtus, se déplaçant le plus souvent dans la profondeur du champ. Il y a autre chose dans Moi, Pierre Rivière qui n’a rien à voir avec l’aspect brechtien dont on qualifie systématiquement le cinéma d’Allio (3) et que viendraient trahir ici le refus du pittoresque, le souci du réalisme (4) et les effets de distanciation. Si le film ne joue pas la carte de l’interprétation, on ne peut pas dire pour autant que le discours qu’il constitue, par rapport au mémoire, se limite simplement à souligner, en restant à distance, l’irréductibilité du texte. A la différence du dossier, il y a un véritable échange entre la voix off, "récitant" le mémoire (comme Rivière lui-même puisqu’il l’avait déjà en partie écrit — mentalement — avant de commettre son crime), et le travail purement cinématographique d’Allio. Au point que le film finit, à son tour, par produire sur le spectateur la même fascination que celle déjà produite, sur le lecteur, par le texte de Rivière et le dispositif de Foucault (la mise en abyme du texte).

Poétique du geste.

Faire "répéter" à des paysans d’aujourd’hui les mêmes gestes que ceux de leurs aînés au XIXe siècle serait donc pour René Allio une façon de se rapprocher du mémoire. Et de rendre, par ce télescopage entre passé et présent, la voix de Pierre Rivière encore plus actuelle. Car le drame de Rivière n’est pas qu’un drame de la paysannerie sous la monarchie de Juillet, c’est aussi un drame des temps modernes. Foucault le rappelait lui-même: "l’affaire Rivière se passe (...) une vingtaine d’années après la mise en application du Code Civil: une nouvelle loi est imposée à la vie quotidienne du paysan et il se débat dans ce nouvel univers juridique. Tout le drame de Rivière, c’est un drame du Droit, un drame du Code, de la Loi, de la Terre, du mariage, des biens... Or, c’est toujours à l’intérieur de cette tragédie que se meut le monde paysan." (5) Le discours juridique se déploie en effet selon un processus complexe où les connexions, non ramifiées, sont si nombreuses, si aléatoires, qu’elles finissent par créer un système illimité et sans axe, ce qu’on appelle un rhizome. La particularité est qu’ici l’image du rhizome renvoie autant à la mécanique judiciaire qu’au mémoire. La même année que Moi, Pierre Rivière, Gilles Deleuze et Félix Guattari publient leur Kafka, sous-titré "Pour une littérature mineure", dans lequel ils définissent l’œuvre kafkaïenne comme un rhizome aux entrées multiples, où "le principe des entrées multiples empêche seul l’introduction de l’ennemi, le Signifiant, et les tentatives pour interpréter une œuvre qui ne se propose en fait qu’à l’expérimentation." (6) Il est peu probable qu’Allio ait eu connaissance du livre de Deleuze et Guattari au moment de tourner son film. Il n’empêche, le manuscrit de Rivière est bien, lui aussi, un rhizome: longues phrases à la ponctuation hasardeuse, irriguant souterrainement la vérité du geste, réseaux guidés par le souvenir et le fantasme, multipliant les entrées et, par cet agencement, déjouant les manœuvres interprétatives.

Mais où sont les entrées? Dans Moi, Pierre Rivière, deux traits caractérisent le personnage: le regard oblique et la tête inclinée (c’est précisé dans le signalement); ils donnent à l’acteur qui l’incarne (étonnant Claude Hébert — 7) une image à la fois douloureuse et de soumission, celle d’un être prisonnier de sa propre condition, comme enfermé "sous la chape grise du bocage normand" (Jean-Pierre Peter, qui collabora au dossier), mais aussi asservi, comme son père, par ce pouvoir diabolique qu’il prête aux femmes. Or, c’est justement en prison, quand Pierre Rivière est assis devant son manuscrit, que son visage se redresse, nous fixant droit dans les yeux, donnant l’impression qu’à cet instant, enfin il existe. En réponse à l’aspect "penché", il y a donc l’aspect "entêté" (c’est confirmé par les témoignages), cette certitude chez lui que, oui, il existe obstinément. A travers le meurtre-mémoire, bien sûr, mais aussi à travers toutes ces machines qu’il inventait et qui, déjà, le distinguaient des autres, le faisaient exister, au même titre que ses extravagances. Certes, l’aspect "entêté" l’isole tout autant que l’aspect "penché", mais il réintroduit le désir que l’horreur des femmes vient bloquer par ailleurs. Après la scène où une jeune paysanne l’embrasse de force, Pierre se réfugie dans le grenier pour bricoler sa "calibène", objet conçu pour tuer les oiseaux et qui se révèle, au bout du compte, parfaitement inefficace. C’est que la jouissance de Rivière n’est pas à rechercher dans sa cruauté envers les animaux mais bien dans la jubilation qu’il éprouve à fabriquer des instruments nouveaux, inconnus de tous — il construit aussi des "albalêtres". Pour autant, et même si l’aspect "entêté" résiste mieux à l’exégèse que l’aspect "penché", cela n’est pas suffisant. Seule la combinaison "penché/entêté", par le mouvement qu’elle détermine, est à même de faire échouer les entreprises d’interprétation. C’est par elle que se forme le réseau qui entraîne le héros dans une dynamique incontrôlable et permet au film de dépasser les oppositions trop attendues (monstre/martyr, dominant/dominé...) qui, elles, ne font qu’ouvrir les portes à l’interprétation. Là est le rhizome.

Comment fonctionne-t-il? Le mémoire de Rivière a quelque chose de kafkaïen dans la mesure où, comme dans Rapport pour une académie, il se contente de relater. Et ce qu’il relate, ce sont des expériences; mieux, de véritables lignes de fuite. Le film n’y déroge pas: il fait l’expérience de la fuite. D’abord à travers le regard fuyant du héros qui vient souvent décentrer l’image (ainsi la scène où, pendant qu’Aimée lit le "mémoire des dettes" à la lueur d’une bougie située au centre du plan, Pierre regarde fixement et de biais son père assis à droite). Mais aussi à travers les mouvements du personnage qui, lorsqu’il n’est pas immobile, en retrait au fond du plan, semble se déplacer dans n’importe quelle direction, tel un électron libre, fonçant tête baissée, jusqu’à venir, parfois, buter sur l’objectif. Il y a une intensité chez Pierre Rivière, renforcée par l’hétérogénéité du mouvement que constitue, au niveau de son corps, la discordance entre la raideur du haut (regard fixe, bras ballants) et la souplesse du bas (démarche légère, presque sautillante). Cette intensité, rhizomale, est aussi celle du film qui multiplie les points de vue, modifie l’ordre des séquences, avance par blocs, parfois ralentissant (les scènes avec les notables), voire s’arrêtant (les photogrammes, les gravures), puis accélérant de nouveau (les scènes de bataille entre le père et la mère, la séquence du meurtre) jusqu’à l’errance finale. Et c’est bien l’intensité de toutes ces lignes de fuite qui permet au film d’échapper à l’interprétation. Où l’on voit que le discours de Rivière, à mesure que le film avance, tend non seulement à noyer les discours extérieurs (des autorités comme des témoins), mais également à effacer, à force de l’intérioriser, le drame qu’il est censé éclairer.

Que reste-t-il alors du meurtre? Comment René Allio s’y prend-il pour rendre le meurtre a-signifiant, nous montrer à quel point l’acte se situe hors du sens? D’abord, il ne choisit pas le hors-champ, procédé un peu trop facile et qui, de toute façon, répond moins à la question du sens qu’à celle de la représentation. Au moment du meurtre, le sujet est hors-scène — ce qui est différent —, c’est-à-dire qu’il sort de la scène, structurée comme une fiction, pour incarner, dans le réel (le réel dans toute son horreur et sa non-structure), l’énigme de son geste. C’est pourquoi la formule de Jean-Pierre Peter, qualifiant le drame d’"Orestie paysanne", n’est pas à prendre dans son acception "tragique" (Oreste tuant sa mère pour venger son père) — ce qui nous ramènerait sur la grande scène (théâtrale) de l’interprétation —, mais plutôt dans ses implications, labyrinthiques, quand se pose la question de la culpabilité et que le doute s’installe (les voix partagées du tribunal lors du jugement d’Oreste). Moi, Pierre Rivière, aussi, est l’histoire d’un doute. Mais ici, ce n’est pas tant le doute juridique, sur la folie du personnage, qui nous occupe que les incertitudes qui font du meurtre un acte véritablement ex-centrique. Il y a dans le crime de Rivière quelque chose qui sonne faux: le sacrifice du frère. Ce geste, loin d’épouser la "logique" qui pousse Pierre Rivière à tuer sa mère et sa sœur, apparaît, au contraire, comme une aberration à l’intérieur du meurtre, un geste de trop, qui non seulement ne permet pas de répondre au pourquoi du meurtre mais, par son incongruité, vient même annuler la question. Un glissement s’est opéré. Le geste ne s’inscrit plus dans cette petite géométrie que représente la relation triangulaire "amour du père/haine de la mère". D’autres mécanismes entrent en jeu, infiniment plus puissants, enracinant le meurtre dans un réseau libidinal monstrueux, alimenté par toute une imagerie, celle des almanachs et des catéchismes que dévorait Rivière lorsqu’il était enfant, mais également ouvert au dehors (toujours le rhizome), à travers la guerre que se livraient le père et la mère, succession de "règlements de comptes" entre Aunay (où la mère venait harceler le père) et Courvaudon (où le père lui répondait lors d’expéditions punitives). Autant de potentiels dramatiques que Pierre Rivière expérimentait, à l’abri des signifiants, et dont la tension, toujours plus grande, ne pouvait que conduire au drame. Quand le réel vient déchirer le masque de la tragédie. Ce que nous montre Allio: non pas la réalité dans ce qu’elle peut avoir de tragique — ça c’est le fait divers —, mais la tragédie dans ce qu’elle a de réel, l’envers du fait divers.

Le geste de Rivière n’appelle donc pas l’interprétation. L’espace qui le soutient est indéterminé. Dans Moi, Pierre Rivière, le meurtre est creusé en son centre, ouvrant une béance dans laquelle vient s’engouffrer le film. Le meurtre semble suspendu dans une sorte d’entre-deux, entre le début de l’acte (vu à la fin du film) et sa fin (vue au début). Qui plus est, il est littéralement filmé en deux temps, trois mouvements, comme s’il était situé hors de toute temporalité, à la fois figé et accéléré. Le premier temps, qui est aussi le premier mouvement, est en fait le dernier: c’est le temps du fait divers, celui de l’après-coup: on découvre, dans un long travelling en plongée, les trois corps ensanglantés, étendus sur le plancher; le deuxième temps survient beaucoup plus tard, après la déclaration des médecins aliénistes, et correspond au meurtre proprement dit. Il contient les deux autres mouvements: dans le premier, on suit le meurtrier, une serpe à la main, traverser précipitamment la cour en direction de la maison où se trouve la mère; dans le second, on est à l’intérieur de la maison: la caméra saisit alternativement, dans un accès de vertige, Pierre Rivière, assénant ses coups, et les victimes, tombant au sol. Entre les deux mouvements, une inscription — "Mémorial du Calvados" — nous rappelle que le meurtre et le texte ne font qu’un, et que le second ne saurait expliquer le premier mais simplement l’éprouver, faire l’épreuve de cette part d’infini qui le rend inaccessible. De sorte que c’est bien le mémoire que l’échappée finale dans les bois, très poétique (Rivière rêve de voir la comète de Halley), vient conclure et que prolongera le suicide. Tous les autres discours, ceux qui visent à l’interprétation, mais aussi ceux qui nourrissent "médiatiquement" le fait divers, ont disparu. Seule demeure la parole de la grand-mère: "Ah mon Dieu, quel malheur!"

(1) Entretien avec Michel Foucault par Pascal Kané, Cahiers du cinéma n°271, novembre 1976.

(2) Entretien avec René Allio par Jean-Claude Bonnet, Cinématographe n°22, décembre 1976.

(3) Guy Gauthier, dans le livre qu’il lui a consacré (Les chemins de René Allio, 1993), a relevé bien d’autres influences chez Allio. Ainsi celle de l’écrivain formaliste russe Mikhaïl Bakhtine et sa notion de "tradition carnavalesque", tradition qui, selon Guy Gauthier, se retrouverait — sous une forme dégradée — dans cette parole populaire que cherche à promouvoir René Allio dans ses films.

(4) Dans une note (inédite) de ses Carnets, René Allio définit ce qu’est pour lui le réalisme: "non pas reproduire la réalité — c’est le naturalisme — seulement tentative de rendre compte de l’effort que l’on fait pour la comprendre" (citation extraite des "Fragments inédits des Carnets de René Allio", in Sociétés & Représentations n°3 — "Michel Foucault. Surveiller et punir: la prison vingt ans après", novembre 1996).

(5) Entretien avec Michel Foucault, loc. cit.

(6) Gilles Deleuze et Félix Guattari, Kafka, 1975.

(7) Peu de films ont permis une telle rencontre, quasi osmotique, entre un acteur, jeune paysan recruté par petite annonce dans un journal local, et son personnage. La trajectoire de Claude Hébert est, à cet égard, exemplaire puisqu’il sera par la suite le geôlier immature de la Drôlesse, le film de Jacques Doillon, puis tiendra des petits rôles de terroriste avant de renoncer au cinéma pour... entrer dans les ordres!

(8) Si Pierre Rivière justifia le meurtre de sa sœur parce que celle-ci aimait et soutenait la mère, il expliqua, à l’inverse, avoir tué son frère pour que le crime paraisse si odieux aux yeux du père que ce dernier n’éprouve aucun regret à son égard lorsqu’il sera condamné.